Comme promis, voici le premier d’une série d’articles sur le titre professionnel REMN, partie CCP2/cc3.
S’il y a une des thématiques qui m’a le plus parlé c’est peut-être le diagnostic de territoire. Parce qu’il rejoint une vieille habitude de faire le tour du quartier, de la ville parfois, à pied. Une habitude qui remonte à mon adolescence puis à ma vie d’étudiant où je passais des heures, parfois une partie de mes découvrir, arpenter.
Arpenter son territoire
Arpenter c’est justement l’un des termes et l’une des pratiques que l’un de mes formateurs du ccp1, Alain Imbaud utilise. Je n’étais donc pas trop dépaysé quand il nous a proposé un d’hiver 2022 bien froid d’aller balader dans les rues
Alors certes arpenter n’est pas faire un diagnostic de territoire en lui même mais cela donne une lecture à mon sens plus intime, plus directe du territoire parce que on va repérer tel ou tel lieu qui sera fréquenté, on va visualiser l’accessibilité d’un lieu ou d’une structure et parfois on va passer la porte et initier le contact.
En ce qui me concerne j’aurais voulu le faire dès mon arrivée sur le territoire mais ma structure souhaitait surtout que je me mette illico en action puis les demandes et les actions se soient enchaînées. Le passage du ccp2/3 a donc été l’occasion de faire enfin ce travail.
C’est aussi une occasion de faire de l’aller-vers, une pratique des centres sociaux. Aller vers les autres structures, les autres acteurs.
Aller vers eux ne veut pas dire que cela fonctionnera pour autant. Pour faire mon diagnostic de territoire j’ai voulu rencontrer plusieurs structures, associations, et si certains ont répondu… d’autres n’ont jamais donné suite malgré des relances et certaines ont proposé une date qui était impossible pour moi, puis malgré des propositions et des contacts ça en est resté là.
Plusieurs raisons possibles à ces silences :
Le temps trop contraint de vos interlocuteurs
Le manque d’intérêt de leur part (celle de là personne contactée ou de sa direction) pour un travail partenarial
Dès conflits politiques sur le territoire (si vous avez parlé à l’un et que l’autre le fait il va ne pas vouloir répondre
Les moyens de les contacter qui ne fonctionnent pas (si, si)
Le travail de diagnostic commence dans sa structure. A la fois du point de vue de l’analyse que de la recherche documentaire et quantitative.
Quelles statistiques sont disponibles sur les publics accueillis, un document de diagnostic du territoire à t il déjà été produit en interne, si oui est il récent ?
Quels services propose votre structure, quelles informations peuvent vous donner des collègues à la fois du point de vue des besoins, des publics que des partenaires.
D’un point de vue pratique, on permet votre lieu en termes d’accueil ou d’accès.
Si il y a un accueil dans la structure c’est peut être aussi un allié précieux car cette personne sera en première ligne pour faire connaître votre diagnostic et distribuer votre questionnaire.
Le questionnaire
Questions
Afin de questionner vos publics, l’étape du questionnaire est fondamentale.
Quelles questions allez-vous poser pour récupérer quelles informations?
De quelles informations avez-vous besoin ?
Attention à ne pas coller vos idées sur ce que vous souhaitez faire pour récolter les réponses que vous espérez non plus, les questionnaires induisent de toutes façons des biais ne serait-ce que de par l’intermédiaire des structures que vous allez utiliser pour les distribuer.
Relais
Dans mon cas, aux Centres Sociaux nos publics sont majoritairement âgés et cela s’est retrouvé dans mes résultats, j’en étais conscient, j’ai diversifié les sources mais je sais aussi que ce sont les premiers publics auprès desquels je vais intervenir. L’idée d’être objectif sur cette question doit plus être dans l’idée d’essayer de l’être. Pour varier les personnes, vous avez plusieurs possibilités (en fonction de votre temps, des interlocuteurs) :
- Demander à vos partenaires de les distribuer à leurs publics
- Prendre contact avec des lieux qui voient passer d’autres publics (commerçants, professionnels locaux)
- Des lieux dans lesquels le numérique peut avoir du sens (réparateur de téléphone, magasin d’informatique, de téléphonie
Faites ce qui vous est possible, certains ne souhaitent pas participer vous pouvez alors varier le format
Format
Vous l’aurez compris, distribuer veut dire passer par un formulaire papier. C’est dans mon cas celui qui a fonctionné. J’ai essayé de proposer le format sous la forme d’un formulaire, mais deux freins importants :
1) Les personnes n’aiment pas remplir des formulaires en ligne,
2) Pour beaucoup, le numérique est déjà un frein.
Au-delà du format papier ou électronique, évitez les questionnaires trop longs, dans l’absolu plus vous facilitez le remplissage (cases à coche), plus les personnes seront volontaires pour les compléter.
J’ai par exemple choisi de faire des questionnaires anonymes demandant uniquement l’âge, le sexe et la situation professionnelle pour les informations personnelles. Pour l’un de mes collègues la notion de code postal était aussi importante car il intervenait sur plusieurs communes, pour un autre c’était la parentalité qui était le critère le plus important. Les choix varient en fonction des actions que vous menez mais dites vous toujours qu’il faudra inciter à répondre. En cela une petite affiche qui accompagne les questionnaires peut favoriser l’engagement.
Si vos questionnaires sont à destination de partenaires, alors le choix d’un entretien, même téléphonique, peut être préférable.
Rencontrer les partenaires, construire des partenariats
Une fois le contact pris, l’échange avec le partenaire peut parfois en rester là car il n’y a pas de volonté ou de temps ou de moyens, mais si possible il peut être aussi intéressant dans ce diagnostic, au-delà de l’analyse des besoins des publics d’imaginer un travail commun. Vos partenaires peuvent être vos publics.
Si le temps vous le permet, si le cœur vous en dit et si il n’y a pas déjà une « locomotive », prenez l’initiative de ce travail partenarial, soyez celui qui va impulser cette dynamique. Les autres en seront peut-être heureux car ils n’ont pas nécessairement l’envie, la disponibilité ou l’autonomie pour. Pensez bien cette relation qu’elle soit liée ou pas à votre projet en amont comme en aval, c’est à dire pourquoi travailler ensemble :
- Qu’est-ce qui manque sur le territoire
- Quels canaux de communication
- Pour quelle finalité
- À quelle fréquence
- Quelles contraintes géographiques
- Quel intérêt pour le partenaire
Le partenaire d’aujourd’hui peut être le collègue ou l’employeur de demain, le relais qui va vous permettre de trouver un autre poste, bref c’est une relation à construire et à entretenir.
Mon expérience sur ce travail
Au-delà de ce que j’ai déjà évoqué concernant l’arpentage, ce temps de diagnostic a été à la fois facilité par le fait que je travaille sur un territoire qui ne soit pas trop étendu comme cela peut être le cas pour certains de mes collègues. De plus, les structures sur mon territoire sont plutôt simples à identifier : MJC, Médiathèque, services de la mairie, CCAS, Maison de Métropole, quelques associations.
Je n’ai pas réussi à joindre tout le monde, je n’ai pas réussi à travailler avec tout le monde. Mais ce n’est pas grave… et ce n’est pas la première fois. A l’époque où je travaillais au Pimms Médiation de Lyon 9e / Vaise, j’ai essayé de rencontrer tous les conseiller(e)s numériques sur ce quartier. Malgré des relances, des prises de contact, il a été compliqué de se rencontrer, idem pour certains autres acteurs du territoire pour à peu près les mêmes raisons que j’ai rencontrées à l’occasion de mon travail sur le territoire.
C’est à la fois très motivant parce que l’on fait de multiples rencontres mais cela peut aussi être frustrant eu égard aux difficultés. Il est important de ne pas négliger ce double aspect quand vous vous lancez dans le diagnostic. Parfois les choses iront vite et dans votre sens, parfois cela sera le contraire et il faudra gérer. Certaines personnes avec lesquelles j’échange qui sont dans le milieu associatif, numérique ou pas vivent cette même ambivalence quand ils veulent travailler sur un territoire. Le territoire sur lesquels elles agissent sont parfois ouvertes aux échanges mais la commune d’à côté par exemple peut ne pas être intéressée, voire ne pas avoir de wifi (un collègue conseiller numérique à déjà vécu cette situation), pas de locaux à mettre à disposition pour une permanence ou bien ne pas répondre du tout aux sollicitations.
Les autres structures ne sont pas toujours ouvertes, disponibles, motivées pour travailler avec vous. Dans ce cas là, commencez avec celles qui vous répondent et essayez d’analyser où se situe le blocage avec les autres, ou bien quel levier pourrait faire évoluer la situation. Même chose, parfois vous aurez des réponses, parfois pas.
Vous n’aurez pas nécessairement beaucoup de temps pour aller vers ces structures parce que vous avez déjà beaucoup d’actions à mener ou parce que votre structure ne souhaite pas interagir avec d’autres, la formation peut alors être le temps, le prétexte de faire ce travail.
N’oubliez pas qu’in-fine que ce travail de diagnostic est là pour connaître les besoins des habitants, répondre à leurs attentes, même si ce public peut être peu enclin à vouloir s’intéresser au numérique. C’est peut être alors votre travail de faire découvrir celui-ci et comment en bénéficier. Votre public est à la fois la source et la destination de ce diagnostic : source de vos informations, destination des actions que vous mènerez en fonction de leurs réponses.
Dans le prochain article je continuerais sur ce diagnostic en vous parlant de méthodologie, sources, documents et de ce que je vais faire au-delà du diagnostic : une veille de territoire.
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