Entre la fin de la formation (mais pas encore du diplôme) de conseiller numérique au CCP2-CCP3, la rédaction d’un document de diagnostic pour les acteurs du territoire, la fatigue générale… Je n’ai pas eu le temps de rédiger un nouvel article. Cette semaine, ce sera donc à nouveau un témoignage sur une action que j’ai créée.
En 2023, À l’occasion de la Semaine du numérique, un événement j’ai créé et mené au Centres Sociaux Fidésiens, un jeu pour les 6-10 ans de l’accueil de loisirs. La première contrainte était de produire quelque chose avec eux, la seconde était que le jeu soit à la fois simple mais aussi attractif pour un groupe d’enfants sur une durée entre 1h et 2h.
Construire un jeu en pratique
Je me suis donc basé sur un jeu préexistant dont j’ai détourné l’usage afin que les enfants puissent rapidement intégrer les règles, et parce que celui-ci me permettait d’interroger leurs usages et connaissances des outils et services numériques.
J’ai pensé au jeu “qui est-ce”, ce jeu où l’on doit poser des questions pour deviner quel personnage son opposant a choisi en posant des questions.
Qui est-ce ? est un jeu de société créé par Theo et Ora Coster (fondateurs de la société Theora Design) en 1979 et édité pour la première fois en France par MB.
Qui est-ce ? est un jeu de société essentiellement pour jeune public faisant appel au raisonnement déductif. Une partie de Qui-est-ce ? se joue à deux joueurs. Chaque joueur dispose d’un plateau sur lequel sont représentés les portraits de 24 personnages. Au début de la partie, chaque joueur choisit secrètement l’un de ces personnages, et le but du jeu est alors de deviner le personnage choisi par l’adversaire, en posant des questions à tour de rôle sur son apparence physique, mais auxquelles l’autre joueur ne pourra répondre que par « oui » ou « non »
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Qui_est-ce_%3F
Ce choix du questionnement autour du numérique est souvent présent dans mes projets, c’est sûrement un tropisme personnel, mais j’avais le sentiment qu’il était adapté car il permettait d’être ouvert aux différentes expériences.
J’ai donc commencé le travail en interrogeant les enfants sur les outils, sur les usages, sur les services liés au numérique qu’ils connaissaient. Nous avons donc listé ensemble des services de streaming, des consoles de jeux, des ordinateurs, des tablettes, des smartphones, parlé de clavier, d’écran, de télévision, de jeu vidéo.
Une fois ce sondage fait, j’ai créé pour chacun de ces sujets, une petite carte avec un visuel représentant l’usage, l’outil, le service. Un temps de création graphique (en gros une feuille A4 quadrillée pour avoir un aspect visuel unifié, un temps de recherche d’images dans un même esprit graphique … Puis la plastification et le découpage des cartes…en plusieurs exemplaires, un groupe ça veut dire que tout le monde ne pourra pas jouer en même temps, ou bien alors en créant des équipes.
Construire un jeu pour les 6-10 ans ?
Au-delà de l’utilité de ce jeu, c’est comment parler de sujets numériques avec des enfants de cet âge qui était un travail à mener. Partir de leur culture, parler avec eux de ce qu’ils font mais aussi de comment ils comprennent l’outil, l’usage ou le service. La construction du jeu était tout aussi éclairante que leur utilisation et les questionnements générés.
C’est quoi le numérique, qui utilise encore les ordinateurs, qui joue en famille à la console, qui n’a pas le droit de jouer à des jeux vidéos… Les questions posées aux enfants étaient l’occasion de débats entre eux, de questionnements.
Certains connaissent des services parce que les parents ont pris un abonnement, d’autres parce que les grands frères ou grandes sœurs les utilisent sur leurs téléphones. Quelles applications connaissent-ils ? Comment ? Pourquoi celle-là plutôt qu’une autre.
La question des choix, l’occasion de partager, l’envie de présenter et valoriser son usage ont provoqué presque autant d’excitation et d’envie de continuer que le jeu en lui-même. Faire participer les enfants à la construction ne se limite donc pas au choix des cartes, mais à échanger avec eux afin de connaître leurs préférences et leurs usages. Cela peut-être l’occasion de voir avec eux comment ils voient le numérique.
Le jeu à l’usage
La semaine suivante, je suis revenu vers les enfants avec un jeu tout prêt. Et c’est à l’usage, en jouant avec les enfants que je me suis rendu compte de plusieurs choses :
Le jeu oblige le joueur à bien réfléchir sa question
En effet, si je prends l’exemple du jeu vidéo, pour y jouer je peux avoir besoin d’un écran, d’une télévision, d’une manette, d’un smartphone, d’un clavier, d’une souris, d’une console, d’une cartouche. s’il s’agit d’un service de streaming je peux l’avoir sur un ordinateur, sur un téléphone, sur une tablette, sur une télévision. Le jeu force à penser comment on utilise ces objets.
Comment poser la question pour déterminer plus précisément de quoi il s’agit, afin de réduire le nombre de questions et de trouver la carte choisie ?
C’est véritablement là l’intérêt du jeu car, enfants comme adultes, ont dû réfléchir aux usages, à la description, aux questions.
Le jeu confronte aux usages
Dans des questions posées, il y avait parfois le besoin de comprendre comment l’autre répond à la question. En effet tout le monde n’a pas les mêmes usages, tout le monde ne les conçoit pas de la même façon. une télévision sera pour l’un le support d’un service de streaming vidéo, pour l’autre l’écran de son jeu vidéo. Certains auront accès au smartphone, d’autres n’auront pas accès aux écrans. Les réponses vont donc varier et les enfants comme les adultes ont dû s’adapter à l’univers de l’autre.
Le jeu fonctionne aussi bien avec des adultes
Si dans la matinée ce sont surtout les enfants qui ont joué, les animateurs se sont aussi pris au jeu. Et le soir, même s’ils étaient surtout là pour récupérer les enfants, deux parents se sont laissés tentés par l’aventure. Et ils ont de la même façon que les enfants apprécié le questionnement provoqué par ce support. C’est ce qui donne son intérêt au jeu au-delà d’être utile pour les enfants, il fonctionne aussi avec les adultes en les amenant à se questionner tout autant.
Depuis je n’ai pas encore trop eu le temps d’y replonger, mais j’imagine des versions alternatives, des “forks”, une version IA par exemple, ou une version plus orientée médiateurs…
Je mettrais bientôt à disposition en creative commons les éléments des jeux créés.
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